Style chlik. Dans le graphisme et les images d’Alice Gavin Services, il y a un dosage bien pensé entre irrévérence assumée, coolitude et traitement graphique brut qui sait subtilement à la fois se tenir et s’effacer. La typographie dansante, fluide et nonchalante semble sortir du cadre trop rigoureux du design graphique pour se frotter à d’autres univers, à d’autres images, rappelant à son lecteur qu’il est toujours possible de contourner la règle. Un mélange tout en contraste savamment pensé qui puise ses références dans le graphisme de Hort (Berlin), les idées d’Experimental Jetset, Eiko Ishioka, la mode de SHOWstudio, Martin Margiela ou les images des magazines Purple dans les années 1990.

Anciennement Groupe CCC pendant 10 ans, studio de design graphique installé au 22 rue Muller dans le 18e arrondissement de Paris, le collectif s’est petit à petit transformé pour devenir en 2020, un bureau de quatre personnes dirigé par Alice Gavin, se spécialisant au passage dans la direction de l’image pour l’art, la mode ou la culture. Des expérimentations artistiques et du graphisme manifeste des débuts, le studio a glissé vers un design graphique plus affirmé, une direction artistique ou créative plus marquée, qui recouvre aujourd’hui un spectre de nombreuses pratiques : digital content, direction photo ou vidéo, en passant par le design digital, éditorial, graphique, et parfois objet. Seules les collaborations artistiques, nombreuses à l’époque du collectif et complètement induites dans le modèle de travail d’Alice, continuent de faire partie intégrante de l’ADN du bureau, ce qui lui donne aujourd’hui à la fois cette esthétique atypique inspirée par les nombreuses rencontres et talents qui gravitent autour d’elle, cette capacité à générer autant de beaux moments humains, (la beauté des émotions qui lui sont chères) que de tirer vers le haut la créativité des personnes qui l’entourent.

Ce rapport à l’autre, c’est aussi ce qui a poussé le Ballet national de Marseille dirigé par la compagnie (LA)HORDE, il y a trois ans, à lui proposer une résidence d’artiste associée, une carte blanche – une de ses plus belles expériences professionnelles et humaines, dira sans doute Alice. Travail sur les archives, photographies documentées ou production d’images qui serviront à la communication du lieu, le travail d’Alice a, entre autres, permis de se glisser dans les coulisses du ballet et d’en découvrir les stocks avec plus de cinquante ans de costumes réalisés par les plus grands designers de mode.

Car si aujourd’hui, le bureau travaille sur des identités visuelles, des magazines, des campagnes pour la mode et le luxe, des livres d’artistes ou des séries photographiques, et teste dans ses projets les possibilités infinies du digital et des images dématérialisées, la question patrimoniale reste l’un des sujets de prédilection du bureau qui travaille activement sur un projet d’exposition au Centre national du costume de scène de Moulins, en vue d’y présenter les archives du ballet. Un contraste de sujets qui rappelle celui du style, et des idées à l’infini. Les agents de Bomba y ont flairé un certain potentiel créatif puisqu’elles ont décidé, depuis fin 2021, de représenter le bureau de direction artistique. Évident.